Il est des vêtements qui traversent les âges sans même que nous nous en apercevions. Si le pourpoint du Moyen-âge ou les immenses perruques de la Renaissance sont à priori définitivement hors du coup, certains autres ont su dépasser leur utilité première pour surfer sur la vague des tendances, ou même en créer de nouvelles. L’histoire de la salopette reflète parfaitement à quel point un vêtement peut faire évoluer nos goûts, voire nous faire outrepasser nos préjugés !
La salopette, un outil de travail avant tout
L’histoire de la salopette commence en 1844 quand Louis Lafont, gendre d’un charpentier, décide de créer un vêtement de travail à la fois pratique et protecteur pour son beau-père. L’idée était ici de lui permettre d’avoir toujours ses outils à portée de mains, tout en le protégeant des salissures et des projections. Il prend donc pour base un largeot, un pantalon ample et resserré aux chevilles, puis coud une poche à sa ceinture. Le premier modèle de salopette venait de voir le jour.
Mais Louis n’est pas un entrepreneur et c’est son petit fils, Adolphe de son prénom, qui déposera la marque de vêtements de travail sous son nom ainsi que le modèle. Avant de breveter la salopette, il l’a tout de même améliorée, notamment en y ajoutant une bavette retenue par des bretelles. Cette première mouture sera appelée la « 406 » et remporte immédiatement un vif succès auprès de tous les travailleurs. Elle constitue désormais le modèle de salopette classique en jean légendaire que nous avons tous en tête encore aujourd’hui.
Les fonctionnalités de la salopette
La salopette est rapidement devenue une icône, au point d’être étroitement associée à l’imaginaire de la Révolution Industrielle. Ceci s’explique bien sûr d’abord par le confort et les fonctionnalités, inédites pour l’époque, qu’elle procure au travailleur. En premier lieu, celle que l’on appelait au début « cote à bretelles » permet avant tout de ne pas se salir, notamment grâce à la bavette ajoutée par Adolphe. C’est bien sûr là l’origine de son surnom inoubliable, qui participera grandement à sa renommée et à sa diffusion en France.
Mais c’est aussi la conception très étudiée de ses multiples poches qui suscite l’admiration. Poche bavette sur le devant, associée à deux fermetures faciles à manipuler, deux larges poches latérales pour glisser toutes sortes d’objets utiles sans les perdre, une poche crayon, une poche mètre, un porte-marteau, les innovations sont extrêmement nombreuses sur le vêtement. Ce n’est pas pour rien si l’histoire de la salopette enjambe les siècles comme si de rien n’était, et surtout qu’elle dépasse désormais largement le cadre du travail.
La reconnaissance internationale de la salopette
Plus de 100 ans après l’idée initiale de Louis Lafont, en 1975, l’histoire de la salopette prend un tournant décisif. C’est en cette année faste que les équipes de Lafont décident de jeter la lumière sur la salopette, en choisissant de conserver la structure d’origine du vêtement mais de l’enrichir par des couleurs vives, très en vogue à l’époque. C’est la consécration. La salopette s’affiche alors sur la couverture du fameux magazine Vogue et tous les citadins branchés, de Paris à Lyon, se mettent à l’arborer fièrement dans la rue.
Cette même année 1975, la salopette traverse l’Atlantique. Des boutiques aussi célèbres que Bergdorf & Goodman à New York la proposent à leurs clients qui s’empressent de l’intégrer à leur garde robe. Ici, on l’appelle « elephant », à cause de la prononciation américaine de ce que l’on peut lire sur l’étiquette : A.Lafont. Pour surfer sur la vague, Levi’s lance la salopette ceinture en denim, baptisée « waist overall ». Un an plus tard, c’estv la créatrice Agnès B. qui popularise vraiment la « cote à bretelles », en créant la première salopette blanche et plus ajustée. Depuis, le succès populaire n’a fait que se renforcer, au point que toutes les grandes marques se sont emparées de ce vêtement devenu iconique.
De l’atelier au grand écran
Quand on pense à l’histoire de la salopette, on doit se rappeler qu’elle fut longtemps réservée aux classes populaires et laborieuses. Nous avant tous en tête les mimiques géniales de Charlie Chaplin dans « Les temps modernes », film qui reflète une époque où le labeur était quotidien pour une grande majorité de la population. Et pour la représenter, quel autre vêtement que la salopette ? Comment ne pas penser non plus à Coluche, qui a toute sa vie moqué les comportements des populos pour mieux les défendre, en portant fièrement sa belle salopette Lafont à rayures !
Plus tard, la salopette est devenue pop. En France, dans les années 80, c’est Sophie Marceau qui crève l’écran dans le film « La boum ». Avec son air à la fois mélancolique, boudeur et chafouin, elle fait passer la salopette au rang de vêtement stylé, jeune et rebelle. Depuis, beaucoup de stars se sont affichées avec une salopette en public. Citons entre autres le mannequin Kate Moss, Brad Pitt, Will Smith ou encore Lady Di. Et n’oublions pas l’un des plus emblématiques inséparables du vêtement : le héros de jeu vidéo Super Mario !
L’histoire de la salopette ne fait-elle que commencer ?
Si la salopette est un vêtement aussi légendaire, c’est aussi grâce à sa nature clivante. On aime ou on n’aime pas, mais porter une salopette n’est jamais un acte anodin. Certains y voient un vêtement sans forme et puéril tandis que d’autres considèrent qu’il s’agit d’un vrai choix de personnalité affirmée. Mais ce qui est certain, c’est que la salopette a traversé toutes les modes depuis plus d’un siècle et demi. Et on vous parie que ce n’est que le début !
En effet, les vêtements appelés à durer dans le temps se reconnaissent souvent aux critiques qu’ils inspirent. Parfois portés aux nues comme le top de l’élégance, puis quelques années plus tard présentés comme obsolètes, ils reviennent finalement toujours sur les podiums et dans la rue. Aujourd’hui, la salopette se décline en short ou en robe, on la porte blanche, crème ou brune. On vous le redit, l’histoire de la salopette ne fait que commencer !